12

 

Lande de Durril, royaume d’Aneira

 

 

 

« Tu sais qu’elle est à ta poursuite.

— Oui, Tisserand.

— Tu sais donc ce qui te reste à faire. »

Le cœur déchiré par le chagrin et la terreur, Fetnalla demeura muette. Elle aurait voulu cacher ses sentiments au Tisserand, mais son désespoir était trop grand. De toute manière, même si elle avait été en mesure d’essayer de lui mentir, il aurait vite éventé ses stratagèmes.

Evanthya s’était lancée à sa poursuite. Elle n’avait pas besoin du Tisserand pour confirmer une certitude qu’elle nourrissait depuis des jours. Rien ne trahissait la présence de sa bien-aimée, mais c’était inutile. Elle la sentait de mille manières, dans les frissonnements de sa peau lorsqu’elle dormait, rêvant à la tendresse de ses baisers et à la douceur de ses caresses ; dans le cri plaintif d’un faucon qui planait, solitaire, au-dessus d’elle et lui rappelait le tourment de leur séparation ; le vent lui-même, léger et tiède, lui semblait charrier le délicieux parfum de son amante. Tout cela n’était qu’illusion, se disait-elle, des chimères nées de son désir de la revoir et de sa solitude. Devant leur persistance, elle avait tenté de se convaincre qu’elles étaient dues, aussi, à la crainte et à la culpabilité que lui inspiraient ses actes. Mais le sentiment d’être suivie n’avait cessé de croître au fil des jours. Et ce qui n’avait été qu’une supposition s’était mué en fol espoir, puis en certitude.

Evanthya la suivait.

C’était évident. Jamais elle ne l’aurait abandonnée, et encore moins depuis qu’elle avait assassiné Brall, duc d’Orvinti, et ainsi révélé son appartenance à la conspiration.

Evanthya la suivait.

Et malgré tout son désespoir, Fetnalla en éprouvait un profond soulagement. Elle-même serait allée au bout du monde, sur l’extrême côte d’Eibithar et de l’autre côté de l’Océan d’Amon, pour retrouver Evanthya. Bien sûr, elle avait fui pour sauver sa vie et rejoindre les membres de la conspiration, des motifs bien concrets, mais aussi pour protéger la ministre de Dantrielle de l’opprobre auquel sa présence l’aurait exposée. Et toutes ces réflexions ne rendaient que plus tragique la réponse que le Tisserand attendait. Car elle n’ignorait pas ce qu’il voulait, et cette perspective la paralysait.

« Tu penses encore qu’elle peut nous rejoindre ? s’enquit-il avec une douceur à laquelle elle n’était pas habituée.

— Non, Tisserand, répondit-elle.

— C’est une réponse courageuse. Je sens combien elle te coûte. »

Il se tut un instant, sans doute pour trouver les mots justes.

« Je dois te demander si tu es capable de faire ce que j’attends de toi, et je veux que tu me dises la vérité.

— Vous voulez que je la tue. »

Pour une fois, le Tisserand ne perdit pas patience.

« Elle doit mourir, répondit-il. Elle représente une menace pour toi et pour le mouvement.

— Le mouvement ne l’intéresse pas. Elle m’aime et ne me fera aucun mal.

— Tu en es sûre ?

— Je la connais. »

Elle le vit hocher la tête. Sa somptueuse chevelure, d’un noir de jais contre la vive lumière qu’il créait pour se protéger, s’agita d’avant en arrière, dans un mouvement lent et très triste, lui sembla-t-il.

« Ce n’est pas suffisant. Il y a un an, je t’aurais peut-être laissée faire, mais aujourd’hui nous sommes trop proches de la victoire pour prendre le risque de la laisser en vie. Tu es la seule à la connaître aussi bien, et comme elle est sur tes traces, c’est à toi de la tuer. »

Fetnalla sentit les larmes ruisseler sur son visage, mais n’esquissa aucun geste pour les essuyer.

« Il n’y a personne d’autre ?

— Si, d’autres sont en route pour nous rejoindre au nord, comme toi. Mais je veux que ce soit toi qui t’en charge. Nous en avons déjà parlé. Je suis convaincu depuis longtemps que cette épreuve est la meilleure façon de prouver ton attachement au mouvement. Si tu es capable de tuer cette femme que tu aimes, alors tu auras gagné une place à mes côtés. Tu feras partie de la nouvelle noblesse, la noblesse qirsi destinée à diriger les Terres du Devant.

— Et si je n’y arrive pas ?

— Je viens de te le dire, il y a d’autres membres du mouvement dans les environs. Si tu refuses, tu ne lui sauveras pas la vie, tu ne feras que mettre la tienne en péril. Tu as fait beaucoup plus que j’espérais de ta part. Je doutais que tu sois capable d’assassiner ton duc, ou un de ses hommes. Ce n’est pas le moment de me décevoir. »

Fetnalla savait qu’elle avait atteint les limites de la patience de son vis-à-vis.

« Bien, Tisserand.

— Tu es sur la lande de Durril.

— Oui, au nord-est.

— Encore loin de la Tarbin ?

— Non. Un jour de cheval, tout au plus.

— Très bien. Reste là. Laisse-la te retrouver. Fais un feu s’il le faut. Je ne veux pas qu’elle mette un pied en Eibithar. »

Fetnalla aurait voulu le supplier d’épargner Evanthya, ou tout au moins de confier cette mission à un autre. Mais elle était à peine capable de tenir debout, de contenir ses sanglots et sa révolte contre sa cruauté, les épreuves qu’il lui infligeait, toutes ses promesses et ses menaces. Alors, paralysée par la peur et le chagrin, en proie à la colère et au doute, déchirée entre son amour et son devoir, elle resta figée, redoutant même de respirer tant elle craignait de s’effondrer.

« Tu es courageuse, déclara enfin le Tisserand. Ta force est très grande.

— Merci », murmura-t-elle.

Et elle ouvrit les yeux en sursautant.

Panya la blanche et Ilias la rouge entamaient leur ascension du firmament. Elles n’étaient toutefois pas assez hautes pour faire pâlir les étoiles qui étincelaient sur le velours soyeux de la nuit. Malgré la tiédeur de l’air, Fetnalla tremblait de tous ses membres. Ses cheveux et ses vêtements étaient humides de sueur, comme après chacune de ses rencontres avec le Tisserand, et son visage ruisselait de larmes. Seule avec son cheval, elle ôta ses vêtements mouillés et laissa le vent léger sécher sa peau et alléger le fardeau qui étouffait son cœur.

Et puis elle s’allongea, remonta sa couverture sous son menton et contempla les lunes jusqu’au moment où le sommeil l’emporta.

Lorsqu’elle se réveilla, le soleil brillait, déjà haut dans le ciel, et réchauffait la lande de ses rayons. Fetnalla se levait à la hâte quand son rêve la rappela à la réalité, aussi violent qu’une vague de l’océan déchaîné. Elle s’effondra.

« Reste où tu es », lui avait ordonné le Tisserand. « Laisse-la te retrouver. »

Elle pouvait refuser, se dit-elle, désespérée d’imaginer une échappatoire. Elle pouvait lui dire que, malgré tous ses efforts, Evanthya était passée sans la voir. À peine eut-elle formulé cette éventualité qu’elle la rejeta : un mensonge aussi éhonté ne tromperait jamais le Tisserand. Il finirait par découvrir Evanthya et la tuerait, elle avec.

Il avait affirmé aussi que d’autres rebelles se dirigeaient vers le nord, qu’ils pourraient remplir sa mission à sa place. Cet argument l’avait convaincue qu’il valait mieux qu’elle tue Evanthya de ses propres mains plutôt que de laisser un autre s’en charger… Elle frissonna. Un autre Qirsi, assoiffé de punir ceux qui restaient fidèles aux cours et désireux de complaire à son chef, pouvait obéir aux ordres du Tisserand avec cruauté. Cette perspective, très probable, l’emplissait de terreur. Désespérée d’y lire la seule justification du geste qu’elle s’apprêtait à commettre, elle s’y accrocha, se leva, s’habilla et entreprit de ramasser du bois pour un feu.

Les arbres étaient rares sur cette partie de la lande, mais il y avait assez d’arbustes et de buissons pour nourrir une flambée. Les branches étaient fraîches, et dégageraient plus de fumée que de chaleur, mais il ne faisait pas froid et elle voulait précisément être vue.

Elle passa la plus grande partie de la journée près de son feu, ajoutant branche après branche pour l’alimenter, allant en chercher d’autres lorsqu’il faiblissait. Régulièrement, elle observait l’horizon, en quête du moindre signe de sa bien-aimée. Alors que les heures s’étiraient, paresseuses et indifférentes à sa souffrance, elle se demanda combien de temps le Tisserand comptait la voir attendre. Evanthya avait pu emprunter une route différente. C’était peu probable, se reprit-elle, étourdie par une nouvelle vague d’angoisse et de chagrin. Plus à l’est, Evanthya aurait eu à franchir la steppe ; et plus à l’ouest, elle se serait trouvée devant les marais de Harrier, ou pire, aurait eu à franchir la rivière non loin de Kentigern, où se déroulaient des combats. Fetnalla avait choisi cette route parce qu’elle était la plus rapide et la plus sûre vers Galdasten. Evanthya l’imiterait.

La journée était bien avancée lorsqu’une silhouette se profila enfin à l’horizon. Fetnalla fut aussitôt debout. Un cavalier dont les cheveux blancs flottaient dans le vent approchait. D’abord, Fetnalla fut sûre qu’il s’agissait d’Evanthya et son cœur s’emballa, non pas à l’idée du meurtre qui l’attendait, mais au plaisir familier de la retrouver.

Mais alors que le voyageur approchait, elle s’aperçut qu’il n’avait rien à voir avec sa bien-aimée. C’était un homme, grand, aux épaules étroites et au visage mince. Pronjed jal Drenthe, Premier ministre d’Aneira ! En alerte, Fetnalla posa la main sur la garde de son épée.

« J’ai vu votre feu », déclara-t-il en arrivant.

Il tira sur ses rênes et arrêta son cheval à quelques pas, sans mettre pied à terre.

« Vous voulez qu’elle vous trouve. »

Fetnalla et Pronjed n’avaient jamais parlé de la conspiration. Après la mort de Carden III, souverain d’Aneira, les deux jeunes femmes avaient envisagé, avec leurs ducs, la traîtrise du Premier ministre du royaume. N’étant jamais parvenus à le démasquer, ils en étaient restés à leurs soupçons. Depuis qu’elle avait rejoint le mouvement, Fetnalla n’avait pratiquement pas croisé cet homme, et leurs conversations ne s’étaient jamais hasardées sur ce terrain. Ils semblaient pourtant sûrs tous les deux de leur engagement mutuel. Leur présence sur la lande était d’ailleurs une preuve à elle seule. Pourquoi seraient-ils là, sinon pour rejoindre l’un et l’autre le mouvement auquel ils appartenaient ?

« On m’a demandé de l’attendre », reconnut-elle prudemment.

Le ministre opina, sans manifester le moindre étonnement.

« Elle est à une journée de cheval derrière moi, lui apprit-il. Elle me suit depuis mon évasion de Dantrielle. »

Le Tisserand lui avait annoncé qu’il y avait d’autres rebelles en marche. Pronjed était de ceux-là.

« Il vous a envoyé ici, s’enquit-elle sur la défensive.

— Oui, mais il n’aurait pas eu besoin. J’ai quitté Dantrielle dans le seul but de rejoindre la lande au plus vite. C’est le meilleur chemin. Quand il a appris que je pouvais conduire la ministre jusqu’à vous, il m’a dit de veiller à ne pas la semer. Allez-vous la… ? »

Il hésita.

« Qu’attend-il de vous ?

— Vous le savez. »

Il écarquilla légèrement les yeux, sans pour autant s’émouvoir.

« En êtes-vous capable ? »

Fetnalla, se demandant s’il posait la question pour son compte ou celui du Tisserand, répondit avec prudence.

« Le Tisserand m’a dit que c’était nécessaire. Le reste n’a aucune importance.

— Je peux m’en charger, si vous voulez. Le Tisserand n’en saura rien. »

Elle le considéra avec stupeur.

« Pourquoi prendriez-vous un tel risque ?

— Vous m’avez guéri lorsque je suis venu vous demander votre aide, et vous avez gardé mon secret. Je ne l’ai pas oublié. »

Ce souvenir, qu’elle avait occulté, lui revint brusquement en mémoire. Ils se trouvaient au château de Solkara pour les funérailles de Carden III, quelques jours avant l’empoisonnement qui avait failli lui coûter la vie. Pronjed avait fait irruption dans sa chambre aux premières lueurs de l’aube. Il avait fait une chute, lui avait-il expliqué, et il s’était brisé un os de la main. Prétextant la discrétion, ou l’entraide que se devaient les Qirsi, il avait refusé de répondre à ses questions, et Fetnalla l’avait soigné sans insister.

« C’était le Tisserand ! s’exclama-t-elle. C’est lui qui vous a brisé la main, vous n’êtes jamais tombé ! »

Il sourit.

« Quelle perspicacité, cousine.

— Pourquoi vous a-t-il blessé ?

— C’était une punition, je l’avais mis en colère.

— Qu’aviez-vous fait ? »

Son sourire flottait toujours sur ses lèvres, mais dans ses yeux jaune pâle Fetnalla vit briller une brève lueur d’effroi.

« Je préfère ne pas en parler.

— Vous ne voulez pas en parler, mais vous êtes prêt à courir ce même risque pour m’aider.

— Disons que je considère avoir une dette envers vous. Et si ni vous ni moi n’en parlons au Tisserand, il n’en saura rien.

— Je ne crois pas que ce soit si simple. Il est presque impossible de lui cacher quoi que ce soit, vous le savez. Et puis, ajouta-t-elle en se détournant vers le sud, je pense que c’est à moi de le faire.

— Comme vous voudrez. »

Ils demeurèrent silencieux.

« Peut-être vaut-il mieux que je m’en aille. »

Elle était seule depuis si longtemps qu’elle faillit lui demander de rester, mais se ravisa.

« Que les dieux vous protègent, Premier ministre. Je vous remercie de votre aide.

— Qu’ils vous protègent aussi, Fetnalla. Nous nous reverrons sur la lande. »

D’un claquement de langue, il fit volter son cheval et s’éloigna au trot vers la frontière d’Eibithar. Fetnalla le suivit un long moment des yeux puis, lorsqu’il ne fut plus qu’une vague silhouette à l’horizon, elle jeta une nouvelle branche dans le feu et s’installa face au sud, dans l’attente de sa bien-aimée.

Le coucher du soleil lui apporta quelque réconfort. Au début de leur cycle, les lunes ne se levaient que plusieurs heures après la tombée du jour et ne montaient assez haut pour éclairer la lande que bien après minuit. Evanthya ne chevaucherait pas longtemps dans l’obscurité. Si elle n’arrivait pas bientôt, se dit Fetnalla, elle ne viendrait pas de la nuit. Elle essaya donc de manger, mais elle n’avait aucun appétit, aussi patienta-t-elle. Lorsqu’elle fut sûre de ne plus voir apparaître Evanthya, elle déroula son couchage et s’allongea, les yeux sur les flammes. Ses vêtements sentaient la fumée, le cheval et la transpiration. Elle n’imaginait même pas son allure. Son allure ! se reprit-elle les yeux brûlants de larmes. Elle n’attendait sa bien-aimée que pour la tuer, et elle songeait à son apparence… Elle finit par sombrer, misérable et accablée, dans un sommeil sans rêve et se réveilla, comme le jour précédent, alors que le soleil brillait de tous ses feux.

Le sien s’était éteint, constata-t-elle.

Zetya, son cheval, hennit doucement.

« Bonjour à toi aussi », lui lança-t-elle en se frottant les yeux.

L’animal poussa un nouveau hennissement et frappa le sol du sabot en relevant l’encolure.

« Qu’est-ce que tu… »

Elle se figea brusquement, le cœur battant. À moins de cent empans, Evanthya se tenait sur son cheval, l’épée à la main, ses cheveux fins agités par le vent. Leurs regards se croisèrent, et elles se dévisagèrent en silence durant ce qui sembla à Fetnalla, bousculée par mille pensées, une éternité.

Elle finit par trouver la force de se lever et, passant une main hésitante dans ses cheveux, glissa les yeux jusqu’à l’épée d’Evanthya.

« Tu as l’intention de t’en servir contre moi ? »

Evanthya considéra un instant son arme et porta de nouveau les yeux sur son amie.

« Je ne sais pas. »

Sa voix était lointaine, comme si la distance qui les séparait avait été beaucoup plus grande.

« Tu sais que je peux la rompre, si je veux.

— Alors nous en sommes rendues à nous battre ?

— Je ne le veux pas. »

Evanthya murmura un ordre à son cheval. Elle tenait toujours son épée à la main et, tandis que l’animal avançait de quelques pas, ses yeux, plus brillants et magnifiques que jamais, ne quittaient pas le visage de Fetnalla.

« Tu as brisé le siège, constata Fetnalla en observant son approche.

— Oui, avec l’aide des autres ducs et l’armée d’Orvinti. »

Elle s’immobilisa juste devant elle et sauta à terre, son épée toujours brandie.

« Ton duc a survécu ?

— Oui.

— Tant mieux. J’ai toujours apprécié Tebeo. S’il te plaît, lâche cette épée, Evanthya. »

Evanthya s’arrêta, soudain indécise.

« Je t’ai dit de la lâcher.

— Et si je refuse ? »

Ce fut aussi facile que respirer, et aussi rapide que la pensée. Dans un tintement métallique, la lame d’Evanthya, désintégrée, se répandit en petits morceaux sur le sol. Comme la nuit où elle avait assassiné Brall et ses hommes, Fetnalla s’émerveilla de son pouvoir et de sa propre aisance à le manipuler. Le Tisserand, par ses propos sur les merveilles que son peuple pouvait accomplir, en l’obligeant à dépasser ce qu’elle était, à voir plus loin que sa condition d’esclave, lui avait offert ce trésor : une assurance infinie, la perspective d’un nouvel univers, et le sentiment d’une liberté inaliénable.

Devant la stupéfaction de sa bien-aimée face à ce qui restait de son arme, elle s’aperçut qu’Evanthya ne comprendrait jamais ce qu’elle éprouvait. Elle assimilait la loyauté à la seule fidélité aux cours eandi. Elle jaugeait toujours la supériorité au nombre de soldats eandi et à la qualité de leurs armes. Elle ne pouvait pas plus imaginer rejoindre le mouvement que se couper un bras. Pourtant, sous le soleil qui inondait la plaine, les cheveux traversés par le vent, Fetnalla se sentait plus ardente et plus forte que jamais. Elle comprenait que le seul moyen de la sauver était de la forcer à dépasser sa condition. Comme le Tisserand l’avait fait pour elle, même s’il fallait la bousculer. Cela ne marcherait peut-être pas. Malgré tout son désir de l’épargner, Fetnalla serait peut-être obligée de la tuer, mais elle devait essayer de la convaincre, pour elle deux, pour ce qu’elles avaient partagé, pour leur amour.

« Tu sais que je suis Façonneuse », commença-t-elle avec le plus de douceur possible.

Evanthya hocha la tête, les yeux obstinément fixés sur la garde de son épée. Une larme roulait sur sa joue, sans qu’elle fasse le moindre geste pour l’arrêter.

« Evanthya… »

La jeune femme leva subitement la tête et plongea les yeux dans le regard de son amie, la réduisant au silence.

« Quand les as-tu rejoints ? demanda-t-elle d’une voix vibrante. Depuis quand es-tu une traîtresse ?

— Je ne suis pas une renégate », répliqua Fetnalla, soulagée de faire face avec autant de calme à cette accusation.

« Ne me mens pas !

— Je ne te mens pas. Oui, j’appartiens au mouvement. J’ai tué Brall et ses hommes parce qu’il le fallait. Cela ne fait pas de moi une traîtresse.

— Balivernes ! Et qu’est-ce que ça veut dire, le mouvement ?

— C’est le nom que nous lui donnons. Nous sommes guidés par un Tisserand, Evanthya. Il veut unir tous les royaumes des Terres du Devant et les diriger. Réfléchis, Evanthya. Un roi qirsi, une noblesse qirsi. Depuis combien de temps notre peuple vit sous la coupe des Eandi, obligé de servir leurs nobles, de livrer leurs combats stupides, et soumis à la pauvreté de leurs esprits limités ? L’heure n’est-elle pas venue de revendiquer ces terres comme les nôtres ?

— Toi, écoute-moi ! Il y a moins d’un an, toi et moi, nous avons dépensé tout notre or pour engager un assassin et frapper la conspiration. Tu savais, nous savions, que ce mouvement, ou quel que soit le nom que tu veuilles lui donner, était une menace pour nos valeurs, nos espoirs, tout ce à quoi nous croyions.

— Nous nous trompions. Je me trompais.

— Non, tu avais raison ! Ces renégats sont responsables de meurtres innombrables dans tous les royaumes. Ils ont assassiné Chago et le roi…

— Le roi n’était qu’une brute despotique, et Chago ne valait guère mieux.

— Alors ils méritaient de mourir, c’est ça ? Et Brall aussi ?

— Oui. Tu sais comment il me traitait. »

Un rire désespéré franchit les lèvres d’Evanthya.

« Il te traitait de cette façon, fit-elle en écartant les bras, parce qu’il pensait que tu l’avais trahi. Je l’ai haï moi aussi, parce que j’étais sûre qu’il se trompait, qu’il était injuste envers toi. Mais maintenant… »

Elle secoua la tête.

« Maintenant, compléta Fetnalla, tu lui donnes raison.

— Bien sûr qu’il avait raison ! Tu m’as trahie, moi aussi. Tu m’as menti, et tu m’as livrée à la mort.

— Non !

— Tu as tué Brall pour empêcher l’armée d’Orvinti de rejoindre à temps Dantrielle. Tu voulais que le château tombe ou, plus exactement, c’est ce que voulait ton Tisserand. Si ton plan avait réussi, si Numar avait écrasé le château, à cause de ta trahison, j’aurais été exécutée avec mon duc et sa famille. C’est la vérité, et tu le sais. »

Fetnalla ne pouvait le nier.

« J’espérais que tu t’échappes, murmura-t-elle.

— Tu ne m’as pas répondu. Depuis quand appartiens-tu à la conspiration ? »

Rien ne l’obligeait à répondre, mais Fetnalla ne voulait pas se dérober.

« Pas très longtemps, avoua-t-elle à voix basse. Quatre ou cinq cycles de lune. Peu avant que vous n’arriviez à Orvinti, toi et ton duc, pour parler de la rébellion au régent. Le Tisserand est venu dans mes rêves.

— Ton comportement était tellement étrange avec moi, se souvint Evanthya. Comme après, lorsque vous êtes venus, avec Brall, à Dantrielle. »

Son regard se fit plus perçant.

« Je me rappelle ce rêve que tu as fait… C’était lui, n’est-ce pas ?

— C’est de cette façon qu’il communique avec nous. Il pénètre dans nos rêves quand nous sommes endormis.

— Je me souviens de ta terreur. Tu pleurais dans ton sommeil. Et c’est lui, l’homme que tu espères voir diriger les Terres du Devant ?

— Ce n’était pas de la terreur mais de l’admiration. Sais-tu ce que l’on éprouve en présence d’un personnage aussi puissant, sais-tu ce que c’est de sentir cette force pénétrer ton esprit ? Toute ma vie, j’ai cru avoir de la chance d’être la servante d’un seigneur eandi. Il m’a montré que je pouvais être tellement plus. Et il m’a promis que je le serai.

— Et il tient ses promesses ! Regarde-toi. Il n’y a pas si longtemps, tu étais Premier ministre d’une grande maison. Aujourd’hui, tu n’es plus qu’une meurtrière, et une fugitive. Il doit être puissant, en effet.

— Arrête !

— Est-ce que tu l’aimes ?

— Pardon ?

— Tu m’as très bien comprise.

— Je l’aime comme j’aimerais un roi, Evanthya. Un vrai roi, ou peut-être même un dieu.

— Oh, non ! s’exclama Evanthya avec une moue de dégoût, je t’en prie.

— Je t’aime toujours. C’est pour ça que je veux que tu me rejoignes, pour que tu fasses partie du royaume que construit le Tisserand pour notre peuple.

— C’est insensé, Fetnalla ! Ouvre les yeux, regarde ce que cet homme a accompli, ce que d’autres accomplissent en son nom. Regarde ce qu’il a fait de toi ! Le royaume dont tu parles, et que tu l’aides à construire, sera – est déjà – bâti sur le mensonge, la violence, la trahison et le meurtre !

— Je t’ai demandé d’arrêter, la prévint Fetnalla en pointant un doigt tremblant de rage en direction du cœur de son amante. Je ne te laisserai insulter ni le Tisserand, ni son mouvement !

— Tu ne me laisseras pas ? »

Une fois de plus, Fetnalla lutta pour contrôler sa fureur. Elle s’était préparée à entendre le discours d’Evanthya. Aux Qirsi qui avaient passé leur vie entière au service des Eandi, la cause du Tisserand était difficile à comprendre. Il bouleversait tout ce en quoi ils croyaient depuis leur naissance, toutes leurs convictions, toutes les certitudes sur lesquelles ils avaient fondé leur existence.

« Dans ta bouche, on dirait un monstre, observa-t-elle posément. Ce qu’il n’est pas. Nous vivons dans un monde dirigé par des despotes, tu n’imagines tout de même pas qu’ils vont nous accorder la liberté que nous voulons. Il faudra la leur arracher.

— Notre liberté ? Nous ne sommes pas des esclaves, Fetnalla !

— C’est tout comme. Mais, s’empressa-t-elle d’ajouter pour couper court à sa riposte, il n’est pas trop tard pour tout changer. Il veut que tu nous rejoignes. Il veut que tu fasses partie de son mouvement et du nouveau monde qu’il est en train de créer.

— Il me connaît ! s’exclama la jeune femme avec une brusque pâleur.

— Évidemment.

— Tu lui as parlé de nous ?

— Il est entré dans mes rêves, Evanthya. Il lit dans mes pensées. Et la plus grande partie d’entre elles te concernent, précisa-t-elle avec un sourire.

— Sait-il que nous avons engagé un assassin pour tuer Shurik ?

— Oui. »

Son mensonge lui était venu spontanément aux lèvres. Elle n’avait pas trouvé le courage d’avouer ce crime au Tisserand et il ne l’avait pas encore lu dans ses pensées. Evanthya n’avait pas besoin de le savoir.

« Il nous pardonne.

— Il te pardonne, la corrigea Evanthya.

— Il est prêt à te pardonner, toi aussi. Il veut que tu intègres le mouvement.

— Je ne te crois pas. Il n’a aucune raison de me pardonner, ni de s’intéresser à moi, sauf pour vouloir ma mort. Et les raisons ne manquent pas.

— Ce n’est pas vrai ! »

Malgré la violence de sa protestation, Fetnalla fut incapable de la regarder en prononçant ces mots.

« Tu mens. Je sais toujours quand tu mens. »

Evanthya regarda autour d’elle, comme si elle découvrait les lieux pour la première fois.

« C’est pour ça que tu m’attends, n’est-ce pas, c’est pour ça que tu as fait un feu ? Il t’a ordonné de me tuer, comme il t’a forcé à tuer Brall.

— Si seulement tu acceptais de nous rejoindre…

— Tu me connais mieux que personne, Fetnalla, crois-tu vraiment que je pourrais servir ce Tisserand ? »

Elle avait accompagné sa question d’un sourire dont la tristesse et la beauté poignante achevèrent de déchirer le cœur de Fetnalla.

« Il le faut, murmura-t-elle, c’est le seul moyen.

— Non, il en existe un autre. Nous avons combattu la conspiration avant, nous pouvons continuer. Quitte ton Tisserand et reviens-moi.

— Je ne peux pas. Il me tuera. Et s’il ne le fait pas, les Eandi s’en chargeront. J’ai assassiné Brall, Evanthya. Même si je le voulais, je ne pourrais pas revenir en arrière. Tant que les Eandi restent à la tête des Terres du Devant, je suis condamnée. Seul le Tisserand peut me sauver. Il y a de la place pour toi. Accepte de me suivre.

— Non.

— Ne m’oblige pas à…

— Puisque tu l’aimes tellement, ton Tisserand, prouve-le. Et s’il faut me tuer pour le faire, vas-y, car je n’ai aucune intention de te laisser le rejoindre. »

Une vague de panique s’abattit sur Fetnalla. Malgré tout ce qu’elle savait de sa bien-aimée, elle n’avait cessé d’espérer que leur amour serait plus fort, qu’il finirait par vaincre sa loyauté envers Aneira et son duc. Elle découvrait qu’elle s’était trompée. Et cette erreur l’emplissait de terreur, de chagrin et d’un sentiment qui ressemblait plus à la révolte qu’à la colère.

« Tu sais que tu ne peux pas m’arrêter, Evanthya, plaida-t-elle une dernière fois. Quelle que soit la puissance de tes dons, je suis Façonneuse. Si tu m’obliges à m’en servir, tu vas mourir. »

Le même sourire douloureux naquit sur les adorables lèvres de son amante.

« Tu ne me feras aucun mal.

— Si. Le Tisserand me tuera si je n’obéis pas. Je n’ai aucun moyen de lui échapper. Je te l’ai dit, il entre dans mes rêves. Il peut me retrouver n’importe où, et il sait comment me faire souffrir, comment me punir si j’échoue.

— Oui, c’est un grand homme, répliqua Evanthya sarcastique, tu me l’as dit. Un homme admirable, en effet. Le digne chef du nouveau monde dont tu rêves.

— Je t’ai dit de ne pas parler de lui sur ce ton !

— Oui, et je m’en fiche. Tu ne veux pas que je me moque de lui… Eh bien moi, je ne veux pas que tu le suives.

— Et comment comptes-tu m’en empêcher ? Avec une brume, un vent ? Même une tornade ne pourrait pas me retenir.

— Je peux te ralentir. »

Elle se tourna vers Zetya et l’animal, comme piqué par un taon, rua et s’élança au galop.

« Non ! s’exclama Fetnalla en bondissant vers son cheval avant de s’arrêter net. Rappelle-le, ordonna-t-elle à Evanthya. Tout de suite !

— Non. Et si tu persistes, je l’envoie au triple galop, tu ne le retrouveras jamais. Tu pourras toujours aller à Galdasten à pied.

— Zetya ! » cria Fetnalla.

L’animal, aussi soudainement calmé, broutait un peu plus loin. Fetnalla émit un petit sifflement, auquel le cheval faillit répondre, mais il baissa l’encolure et l’ignora.

« Rappelle-le, Evanthya !

— Il va revenir tout seul. Le charme n’est pas éternel. Mais si tu ne veux pas le perdre pour de bon, il va falloir que tu m’obéisses.

— Je ne veux pas te faire de mal.

— Tu es censée m’assassiner. Si tu veux vraiment rejoindre le Tisserand, finissons-en. Tue-moi maintenant. Ton cheval reviendra et tu pourras repartir. Ou bien suis-moi.

— Ce n’est pas un jeu ! s’exclama Fetnalla au bord des larmes. Si tu m’y obliges, je te tuerai. Je dois le faire. Il me l’a ordonné.

— Alors fais-le. »

Des larmes brûlantes jaillirent des yeux de Fetnalla. Elle les chassa d’une main tremblante.

« Je t’en supplie, Evanthya », bredouilla-t-elle.

Elle était incapable de remplir sa mission. Elle savait les souffrances que le Tisserand lui infligerait lors de sa prochaine visite. Pourtant elle déclara : « Pars. Va-t’en maintenant. Je t’en supplie. Je ne veux pas te faire de mal.

— Je croyais qu’il t’avait donné l’ordre de me tuer.

— C’est vrai.

— Mais tu ne peux pas.

— Non. Va-t’en.

— Je le savais, triompha Evanthya. Tu n’es pas une traîtresse. Je sais combien les accusations et le comportement de Brall t’ont fait souffrir. Mais tu es des nôtres. Ce Tisserand n’y peut rien.

— Tu te trompes. Je suis heureuse que Brall soit mort. J’ai juré fidélité au Tisserand et à sa cause. Tu peux dire ou croire ce que tu veux, je ne te suivrai pas. Maintenant pars, je t’en supplie, avant qu’il ne soit trop tard.

— Tu dois venir avec moi.

— Non.

— Très bien. Tu ne me laisses pas le choix. »

Evanthya se tourna vers Zetya qui les observait, paisible, au milieu des herbes hautes.

« Non ! » hurla Fetnalla.

Et avant même qu’elle comprenne, elle sentit sa magie s’élancer hors d’elle, brûlante, sauvage, vengeresse. Elle entendit le craquement étouffé d’un os, et vit Evanthya s’effondrer dans un cri, la main sur son épaule.

« Par les démons et toutes les flammes ! » sanglota-t-elle en se précipitant vers son amie, recroquevillée sur le sol, les yeux fermés et le visage tordu de douleur. « Tu vois ce que tu m’obliges à faire. Je t’avais prévenue !

— Va jusqu’au bout ! Il veut ma mort, alors vas-y, tue-moi. »

Fetnalla, excédée par tant d’entêtement, même maintenant, foudroya son amie du regard.

« Non, je ne te tuerai pas. Ce n’est pas la peine. Reste loin de moi, Evanthya. La prochaine fois, je n’aurai pas le choix.

— Alors fais-le maintenant », lui répliqua sa bien-aimée, les dents serrées. « Parce que je vais te suivre. Tu ne peux pas plus me fuir qu’échapper à ton Tisserand. »

Fetnalla, le visage ruisselant de larmes, se releva.

« Tu l’auras voulu », fit-elle sans la quitter des yeux.

Puisant une seconde fois dans sa magie, anéantie par le craquement sec et le cri de douleur qui s’échappait des lèvres d’Evanthya, elle lui brisa la jambe.

« Essaie de me suivre avec ça. »

Puis elle siffla, et son cheval, cette fois, trotta vers elle.

« Tu me laisses, lâcha Evanthya dans un souffle, comme ça ?

— C’est de ta faute. »

Elle allait enfourcher son cheval quand il se braqua et s’écarta.

« Evanthya, arrête ! »

Elle tendit la main vers les rênes. Une nouvelle ruade la repoussa.

« Arrête ! cria-t-elle en faisant volte-face. Tu ne peux pas me laisser partir, hein ? Tu veux que je te tue ?

— Je ne te laisserai pas le rejoindre. Tu as causé trop de dégâts.

— Tu m’obliges à aller au bout.

— Nous y sommes déjà. Combien de temps penses-tu que je puisse survivre avec une épaule et une jambe cassées ? »

Certainement pas longtemps, songea Fetnalla. Mais ses chances de survie étaient si minces qu’elles lui fournissaient l’explication dont elle aurait besoin lorsqu’elle ferait au Tisserand le récit de sa mission.

« C’est toi qui l’as voulu », décida-t-elle en empoignant les rênes de Zetya avant qu’Evanthya ne puisse activer sa magie.

Docile, l’animal se laissa enfourcher. Prête à partir, Fetnalla pourtant se retourna une dernière fois et le spectacle de son amante gisant sur le sol, les traits tirés, le visage brillant de sueur, et abandonnée, lui déchira le cœur. Elle aurait dû s’enfuir. Jamais elle n’arriverait à expliquer son geste au Tisserand. De toute manière, ce serait inutile. Il devinerait. Alors elle sauta à bas de sa monture et se précipita auprès d’Evanthya. Celle-ci eut un mouvement de recul, mais Fetnalla posait déjà les mains sur son épaule blessée.

« Ce ne sera pas long », murmura-t-elle en faisant appel à son don de guérison.

D’une secousse, dont la brusquerie arracha un cri déchirant à la jeune femme, Fetnalla redressa l’os tout en insufflant la magie nécessaire pour le ressouder. Elle fit de même ensuite avec sa jambe. La fracture, plus nette, fut d’autant plus facile à soigner que Fetnalla ne voulait pas la guérir tout à fait. Si elle remettait Evanthya sur pied, elles se retrouveraient à leur point de départ. Il lui suffisait d’empêcher Evanthya de la suivre, tout au moins de la retarder. Sa jambe et son épaule fragilisées la retiendraient au moins assez longtemps.

« Pourquoi ? lui demanda la jeune femme lorsqu’elle eut terminé.

— Je te laisse y réfléchir, répondit Fetnalla en se relevant.

— Je vais te suivre.

— Je sais. Ne force pas trop. Sinon tes os se casseront de nouveau. »

Elle se dirigea vers Zetya qui se laissa monter sans broncher.

Evanthya se redressa avec une grimace.

« Si tu viens sur la lande, l’avertit une dernière fois Fetnalla, le Tisserand nous tuera toutes les deux. »

Evanthya se tint coite.

« Tu peux en douter, mais je t’aime, poursuivit-elle. Je n’ai jamais cessé de t’aimer. »

Redoutant plus que tout le silence de la jeune femme, un silence qu’elle n’aurait pas supporté, elle fit pivoter son cheval et s’enfuit au galop. Le soleil, haut dans le ciel, chauffait la lande de Durril, mais elle ne sentait qu’un vent froid mordre ses larmes.

Elle chevaucha ainsi toute la journée, sans manger, buvant à peine, les yeux fixés sur l’horizon, limitant ses pensées au Tisserand et à la guerre qu’il lui avait promise. Le passé était mort. Seul comptait l’avenir à présent, le sien, celui des Qirsi, et leur destin sur les Terres du Devant. Pas une fois elle ne regarda en arrière, même quand elle crut entendre le martèlement des sabots d’un cheval lancé à sa poursuite.

La Couronne des 7 Royaumes [9] L'Alliance Sacrée
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